mardi 12 mai 2015

Ici et Maintenant, et ailleurs en même temps.



Extrait d'en ce moment. 



"Un chat franc, snob un peu, aimant les câlins mais n'ayant jamais l'air de les attendre. Un qui mène sa vie dans une confortable routine, regardant sans aucune envie s'agiter toutes les autres créatures autour de lui. Les discours passent au-dessus de lui, il clignera des yeux pour avouer qu'il entend quelques sons, dont il ne tiendra aucun compte.

Il n'y a pas que sa gamelle qui importe, mais il aime faire comme si. Après tout, il peut se passer des autres. C'est leur problème, aux autres, s'ils continuent à préférer ne pas se passer de lui. Mais quelque part à un coin de belle oreille, ça lui fait plaisir, de faire partie d'un monde particulier. Avec des personnes particulières.

Ceux qui acceptent de comprendre les chats le remarquent.


Et moi qui les adore, je m'intéresse à ce chat. Il faut dire que je m'intéresse à tous les chats, quand ils croisent ma route. Surtout quand ils s'installent un moment. Mais j'ai beau m'auto-complimenter sur ma tendance à laisser les animaux en paix au lieu de les "embêter" comme lorsque j'étais plus petite, il y a toujours un défi, toujours une envie d'au moins aller au contact. Chat, lézard, rongeur... Emile Ajar écrivait sur un idéal de tendresse essentielle, il doit y avoir de cela, mais pas que. Un genre de volonté d'observation appuyée, aussi. Ne pas se contenter d'un coup d'oeil et d'un avis global et inconsistant. "Oui, c'est un chat quoi."


Entrer dans la danse. Se rapprocher d'un pas à la fois, d'une idée de pas à la fois. Guetter la moindre réaction en face, de fuite, de défense, d'apaisement. Essayer de masquer ses intentions, trouver le temps de prendre le temps, prendre plaisir au jeu sans s'inquiéter tant que ça du résultat.


J'en suis à hésiter à tendre la main, vers ce chat plutôt rassuré et qui reste calme près de moi. La dernière fois, j'ai hésité pour deux choses : l'envie d'y mettre d'abord quelques mots "Tu me prête un bras?" par exemple, mais la crainte de briser le moment de paix chaleureuse qui existait. Puis, sans mots, le doute qu'il y aurait à ne rencontrer que de la gêne et de la politesse où j'espérais plus qu'une acceptation forcée, plus qu'une acceptation tout court.

Donc, réserve.

Et maintenant encore, réserve, car le chat n'a en rien changé son attitude. Pas plus pressé de venir quand je tends la main, pas plus ronronnant quand j'approche.


Le genre "ingrat" ou "insensible" que détestent une partie de la population. J'aime bien, moi. Parce que j'ai le temps, et mes sensations fantômes, mes scénarios qui se jouent avant d'être effacés. Parce que c'est nettement moins prévisible que tous les derniers challengers dans ce domaine là, que je trouvais trop pressés. Le jeu est plus intéressant de ne pas savoir si nos objectifs sont communs. Il est plus intéressant parce que si je parviens à m'approcher encore et à finalement pouvoir l'entendre ronronner dans mes bras, l'aventure se diversifiera.

L'enjeu est important, c'est un chat. Long time no see, so close. C'est pour ça que je serai plus frustrée de le voir s'enfuir lui, qu'un autre. Ou d'entendre qu'il a des choses bien plus importantes à gérer qu'une relation avec moi. Genre, jouer sur l'ordi. Et boire du coca."

[Nanda Devi, la Belle sauvage... à Cotonou]
_______________________________________________________________________

"Je me dis que si j'étais une fille cool, j'en profiterai là, tout de suite, pour le serrer dans mes bras. Mais je sais que je ne peux pas le faire, je ne suis pas cette fille cool. [...]

J'ai déjà veste, parka, sacs, je vais pour remettre encore à bien plus tard l'avancement de mon projet, puis il va passer près de moi, éconduit par le chat. Mon bras se tend, en travers de son chemin et de sa poitrine. Bougé-je ou bien se laissa-t-il ramener ? Sais pas, en tout cas je suis contre lui. Son bras dans mon dos, les yeux fermés, léger vertige délicieux. J'écoute son souffle, il y a droit à 5 respirations toutes différentes, que j'attrape et étiquette "à analyser plus tard". Dans l'instant je trouve ça super chouette, qu'elles soient toutes différentes.

Puis une légère caresse, un peu à la "there there" de Sheldon mais en moins guindé quand même. Une caresse stéréotypée, je dirai ; Ceci dit je suis loin d'avoir mon compte de ce genre de stéréotypes.
Puis "ça va ?" - Oui, fis-je en me détachant. Quelques autres phrases non-importantes.
Une re-tentative pour avoir un rencard, de ma part. Je suis vraiment une fille harcelante, parfois. Rarement.
Je pars avec ces respirations, le léger vertige et le big smile.

Maintenant je sais que je pourrai avoir toujours des premières fois, toute ma vie. Première fois que mon bras se tend sans accord officiel.


Il y a beaucoup de place sur lui pour moi. Il sent bon. Le vertige est bon signe, pas comme "Tu sens quelque chose ? - Pas autant que je le devrai." Powa !"

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire